Pourquoi je n’utiliserai plus l’IA, cette nouvelle dictature de la commodité.
https://jeanvoguet.com/wp-content/uploads/2024/12/2024-12_ia-dictature-commodite.pdf
La curiosité amène à tester les plateformes d’IA générative dédiées à la “création” musicale. Il faut dire que certaines, plus particulièrement stableaudio, sont incroyablement efficaces. Même si celles-ci, destinées plus particulièrement aux “producers” (car cela reste avant tout un outil mis en place pour le musical business), ne semblent pas à priori adaptées à la recherche musicale, elles s’avèrent très performantes quant à générer des matières sonores inouïes. Grosso modo, en très peu de temps d’apprentissage, il devient possible de produire des sons complexes en quelques secondes alors que ceux-ci demanderaient des heures d’élaboration sur les outils habituels de synthèse sonore.
Au-delà de ce “miracle” si tentant se trouve le pourquoi de cet article.
Sans aborder le plagiat induit inéluctablement par le deep learning très actif de ces plateformes, car de toute façon il ne présente aucun “danger” pour des musiques non formatées qui ne font partie d’aucun marché lucratif, il faut cependant porter toute notre attention sur l’aspect énergivore de cette pratique.
Les prévisions actuelles indiquent une multiplication de 4 à 9 fois de la consommation énergétique de l’IA d’ici 2050. Autant dire que la situation est intenable sachant qu’aujourd’hui celle-ci représente déjà une émission de CO2 presque équivalente à celle de l’aviation civile.
Agissant quotidiennement pour limiter mon empreinte carbone (1.) et au même titre que d’avoir toujours refusé de publier mes œuvres sur CD ou 33t (2.), il m’est impossible éthiquement de valider l’utilisation de l’IA même pour poursuivre des recherches artistiques car il n’est pas acceptable que cela se fasse sur le dos de notre planète.
Il nous faut aussi ne pas oublier les autres méfaits majeurs induits par l’utilisation de l’IA que sont une régression sans précédent des droits & libertés ainsi que la démultiplication des violences du néolibéralisme et de l’État.
Aussi, tout artiste se devrait d’évaluer la faisabilité de chacune de ses utilisations de matériaux, de chacun de ses modes d’action, etc… avec tout ce que cela implique environnementalement et humainement.
De toute façon, les compositeurs et musiciens disposent actuellement d’une telle palette d’hardwares, de logiciels & plugins que l’IA – écocide (3.) – n’est vraiment pas fondamentalement nécessaire dans leur processus créatif.
________________________________ 1. Tout le matériel composant le dispositif 32.2 du CRANE lab a été acquis en seconde main, les enceintes trop gourmandes en énergie ont été remplacées par des plus petites, plus adéquates au volume de l’espace de diffusion. 2. La matière des CD se compose de polycarbonate qui libère du BPA (perturbateur endocrinien). Celle des 33t : de polychlorure de vinyle, un vrai poison ! 3. La Quadrature du Net : (…) ces politiques sont dangereuses dans la mesure où, loin de la technologie salvatrice souvent mise en exergue, l’IA accélère au contraire le désastre écologique, amplifie les discriminations et accroît de nombreuses formes de dominations. Le paradigme actuel nous enferme non seulement dans une fuite en avant insoutenable, mais il nous empêche aussi d’inventer une trajectoire politique émancipatrice en phase avec les limites planétaires. (…) https://www.laquadrature.net/2024/11/29/cest-pas-de-lia-cest-de-lexploitation-dernier-cri/